CE, 5-6 chr, 12 févr. 2020, n° 435498, Lebon
Il résulte des travaux parlementaires préparatoires à la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 que le législateur a entendu inclure dans le champ d’application de la prescription décennale que prévoit l’article L. 1142-28 du code de la santé publique (CSP) non seulement les actions susceptibles d’être engagées contre l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) sur le fondement des articles L. 1142-24-9, L. 1221-14, L. 3111-9, L. 3122-1 et L. 3131-4 du CSP, mais aussi, bien qu’elles ne soient pas expressément mentionnées par l’article L. 1142-28, celles susceptibles de l’être sur le fondement de l’article L. 1142-1-1 du même code.
Lorsque, en application du quatrième alinéa de l’article L. 1142-7 du CSP, la saisine de la commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, soit par une demande au titre de la procédure de règlement amiable, soit par une demande au titre de la procédure de conciliation, a suspendu le délai de prescription applicable à l’action indemnitaire, il résulte des dispositions de l’article 2238 du code civil que ce délai recommence à courir pour la durée restant à courir ou, si celle-ci est inférieure à six mois, pour une durée de six mois.
Si la demande a été présentée à la commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux au titre de la procédure de règlement amiable, le délai de prescription recommence à courir, dans le cas où la commission conclut à l’absence de droit à réparation, à compter de la date à laquelle cet avis de la commission est notifié à l’intéressé.
Dans le cas où la commission estime que le dommage est indemnisable par un établissement de santé ou au titre de la solidarité nationale, si l’intéressé reçoit une offre d’indemnisation de l’assureur de la personne considérée comme responsable ou de l’ONIAM, le délai recommence à courir à compter de la date de réception de cette offre.
Si la demande a été présentée au titre de la procédure de conciliation, le délai de prescription recommence à courir à la date à laquelle l’intéressé reçoit le courrier de la commission l’avisant de l’échec de la conciliation, ou à la date à laquelle le document de conciliation partielle mentionné à l’article R. 1142-22 du CSP est signé par les deux parties.
En prévoyant, au second alinéa de l’article L. 1142-28 du CSP issu de la loi du 26 janvier 2016, que les règles de la prescription extinctive prévues au titre XX du livre III du code civil s’appliquent au régime spécifique de prescription décennale, le législateur a entendu fixer l’ensemble des causes interruptives inhérentes à ce régime et exclure, par suite, à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi du 26 janvier 2016, pour les litiges de responsabilité médicale mettant en cause des personnes publiques, l’application des causes interruptives prévues par la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics.
Or, à la différence de ce que prévoient les dispositions de la loi du 31 décembre 1968, aucune disposition du titre XX du livre III du code civil ne prévoit qu’une demande de paiement ou une réclamation adressée à une administration ait pour effet de suspendre ou d’interrompre le délai de prescription.
Par suite, qu’elle soit formulée antérieurement ou postérieurement à l’avis rendu par une commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, une demande indemnitaire présentée à l’administration n’est pas de nature à suspendre ou interrompre le délai de prescription prévu par l’article L. 1142-28 du CSP.
Cf., sous l’empire du droit antérieur à la loi du 26 janvier 2016, CE, 23 juillet 2014, Mme Data, n° 375829, p. 241.
Comp., s’agissant de l’effet interruptif d’une telle saisine sur le délai de recours contentieux, CE, 17 juillet 2013, Mme Houcham, n° 368260, T. pp. 755-829.